« Les candidats sont nos amis, il faut les aimer aussi ».
Chaque recruteur doit se positionner vis à vis de ses candidats, sur une échelle de sympathie allant de « ne parlez que quand je vous y autorise » à « allons boire un coup ensemble pour voir le match ». Jamais facile de trouver le bon équilibre !
Un candidat que vous rencontrez en entretien est peut-être votre futur collaborateur, mais êtes-vous ami avec tous vos collègues ? Est-ce que vous êtes prêt à parler de vous au même titre que vous souhaiteriez qu’il vous parle de lui ? Entre moralité, pragmatisme et bonnes pratiques, voici quelques recommandations :
Restez professionnel à 100%
N’encouragez pas le candidat à aller sur des terrains qui ne sont pas liés à votre entretien. Déjà parce que le candidat n’a pas forcément envie de parler des aspects extra-professionnels de sa vie à quelqu’un qu’il ne connait pas et qui pourrait devenir son employeur, mais surtout parce que tout ce que vous pourrez demander qui sort du cadre professionnel pourrait être une source de discrimination à l’embauche.
Lisez-moi bien : même si vos intentions sont louables, vous pouvez inconsciemment porter un jugement différent sur un candidat en fonction de ses activités extra-professionnelles (« Ah tiens, vous faites du ping-pong ? Moi aussi ! »), mais surtout parce que même si vous ne tenez pas compte des informations que le candidat va vous communiquer pour votre évaluation, le candidat n’en sait rien. Et dès lors que vous lui posez une question qui n’est pas liée à sa capacité à tenir un poste (« Quel est votre livre de chevet ? »), il pourrait vous attaquer pour discrimination illégale à l’embauche. Même si son dernier livre de chevet traite du ping-pong.
Il y a également une notion de perception de la part du candidat : le fait que vous posiez une question hors contexte professionnel peut être interprété dans un sens différent de celui que vous aviez en tête.
Gardez la distance
On peut créer du lien lors de l’entretien, mais je ne veux pas entendre parler de ce qui ne me regarde pas !
Je pense à ce candidat qui a essayé à deux reprises de me faire part de ses opinions politiques (il avait vraiment envie d’en parler) ou à ce candidat qui a souhaité me montrer une photo de ses enfants alors que je ne le connaissais que depuis 2 minutes et que je ne le lui avais pas demandé. Je vous passe la candidate qui a montré à un directeur la photo des abdos de son mari en entretien. #WTF
Vous pourrez penser, chers lecteurs, qu’il n’y a pas de mal. Après tout, c’est plutôt sympa et ça montre un côté très humain, non ?
Oui mais si je décide de dire non à un candidat à la suite de cet entretien, qu’est-ce qui l’empêchera de m’accuser de discrimination ? Et de manière plus simple : si le candidat partage des aspects de sa vie privée, dans la mesure où l’entretien de recrutement est un échange, n’est-ce pas étrange si le recruteur ne partage rien de sa vie personnelle en retour ?
N’acceptez pas le tutoiement si le candidat en prend l’initiative.
Je suis très mal à l’aise quand un candidat me tutoie. Surtout s’il en prend l’initiative.
Ca commence par le tutoiement, ça n’a rien de méchant. Mais un processus de recrutement prend plusieurs jours, et l’ouverture au tutoiement ouvre également la porte à un processus où le candidat pourra se rapprocher de vous. Si vous brouillez les lignes, attendez-vous à des surprises.
Il n’est pas facile de devoir donner une réponse négative à quelqu’un que l’on tutoie, et il est encore moins facile de recevoir une réponse négative de la part d’un candidat qui vous tutoie (« Non je ne travaillerai pas avec toi. Merci, bisous. »). Le vouvoiement dans le cadre d’un recrutement peut paraître un peu plus froid, mais il permet de garder une distance que beaucoup de situations rendent nécessaires. Pour rappel, pour 1 candidat à qui un recruteur dit oui, il y en a entre 10 et 30 à qui il dit non, au minimum. Cela n’empêche pas de donner des réponses négatives motivées et personnelles, mais ça évite les débordements et / ou négociations.
Si vous tutoyez un candidat, alors il faudra les tutoyer tous. Déjà parce que si vous êtes un recruteur digne de ce nom, vous parlez à plusieurs dizaines de personnes par semaine et vous ne vous rappellerez plus de qui vous tutoyez et qui vous vouvoyez (!), mais surtout car sinon tous les candidats ne seront pas sur le même pied d’égalité.
Pour autant :
- On peut appeler quelqu’un par son prénom et le respecter.
- C’est à chacun de voir comment il se sent face à son processus de recrutement.
- Je n’ai aucun problème avec le fait que certains managers « métier » tutoient mes candidats lorsque je les vouvoie. J’ai un rôle à tenir mais eux peuvent se le permettre, ils ne sont pas « au front » avec les candidats, il ne rencontrent normalement que ceux avec qui tout se passe bien.
- Si le candidat prend l’initiative de me parler de ses « hobbies », je ne l’interromps pas, pourvu que ça soit pour me parler d’aspects en lien avec le job (i.e. les valeurs du sport, le leadership, la gestion de projets…).
Et vous, comment réagissez-vous quand un candidat vous parle de sa vie privée ?

Fondateur et Dirigeant de WorkMeTender
Passionné de recrutement, cela fait 12 ans que j’aide les entreprises à recruter les meilleurs talents, en proposant des solutions simples et innovantes. A travers WorkMeTender, je propose mes services pour accompagner DRH, Responsables Recrutement, Recruteurs et Responsables Marque Employeurs dans l’atteinte de leurs objectifs.
J’enseigne également le recrutement et la Marque Employeur au CELSA.
Bonjour,
Je partage complètement votre avis sur le tutoiement et le recadrage nécessaire très rapidement pour éviter les débordements. Il m’arrive aussi fréquemment d’être en situation ou un opérationnel tutoie le candidat alors que moi je le vouvoie. Cela permet aussi de mesurer l’habilité du candidat à gérer différents niveaux de communication.
En revanche, je trouve cela intéressant de connaitre les « centres d’intérêt » des candidats car ce sont avant tout des individus et beaucoup de qualité humaine peuvent se retrouver dans la vie pro et perso, notamment pour des postes qui impliquent beaucoup de « soft skills ». Après il va sans dire que tout est une question de dosage. Les exemples que vous présenter sont très exagérés et je vous rejoint sur le fait que ces situations soient hors sujets.
Merci à vous, en tout cas, pour ce blog qui retranscrit très bien le quotidien de ce métier qui semble si facile de l’extérieur mais demande quand même certaines qualités.
Hello,
Merci pour votre commentaire. Nous faisons en effet un métier plus difficile qu’il n’y parait 😉
Jean-Marie
Bonjour,
On ne tutoie pas les postulants. Je suis tjrs interloqué de cette “fausse familiarité” posée d’emblée de jeu par rapport à des personnes inconnues dans un cadre d’échange professionel. Les personnes sont sur un pied d’égalité et cette fausse familiarité est totalement irespectueuse. On ne peut rien construire sur une base aussi bancale avec une personne qui d’emblée agit comme ça; Qu’est ce que cette attitude donnera dans un cadre professionnel ? A mon avis, pas grande chose de bon.
Nous ne sommes pas amis ou voisins de longue durée, nous sommes là pour établir un contrat ou la familiarité des postes peut mener au tutoiement… Je viens d’un entretien ou j’ai fini par insulter le recruteur en sortie, car sa familiratité peu singulière cachait un manque total de respect sur la qualité réel de cet entretien, la façon de le mener et d’y mettre un terme.
Bonjour Olivier,
Merci pour votre témoignage.
Il faut prendre en compte le cadre de travail : dans certains secteurs d’activité, le tutoiement est de rigueur.
Le tout est de demander à l’avancer au candidat s’il est à l’aise avec le fait que l’on se tutoie, mais ne pas obliger.
Après, si vous êtes collègues et que vous êtes amenés à vous tutoyer dès le premier jour, ça ne choque pas. Si entre collègues vous vous vouvoyez, ça pourra en effet créer un fort effet de décalage !
Il n’y a pas de règle, mais en tant que recruteur il faut savoir s’adapter à toute situation 😉
A bientôt !
Jean-Marie